A/ Typologie.
1) Classification en fonction de la nature des actes.
Ä Les actes formellement internationaux : ils sont directement destinés à produire des effets en DI, car ce sont des manifestations de la politique extérieure des Etats.
· La reconnaissance est un acte unilatéral par lequel un Etat constate l’existence de certains faits ou actes juridiques et admet qu’ils lui sont opposables (un Etat, une OI dont il n’est pas partie,…). Ce procédé réunit 2 éléments : – l’auteur de l’acte n’a pas participé à la naissance de l’acte ou du fait qu’il reconnaît.
– cette situation lui devient juridiquement opposable, du fait de la reconnaissance.
· La renonciation est un acte par lequel un Etat abandonne volontairement un droit, ou renonce à une prétention (renonciation à l’immunité de juridiction devant certaines juridictions étrangères,…).
· La promesse est un acte unilatéral par lequel un Etat fait naître des droits nouveaux au profit des tiers.
· La déclaration est l’acte par lequel un Etat fait connaître sa position sur une certaine situation. Il engage ses droits et ceux des tiers (déclaration de guerre, de neutralité,…). La notification est parfois assimilée à cette notion, mais il s’agit plutôt de l’acte qui assure la publicité de l’acte constituant la déclaration.
Ä Les actes internes à portée internationale : seuls ceux qui mettent en œuvre une compétence internationale de l’Etat (loi ou règlement pris lors de la mise en œuvre d’un traité international) pourront devenir des actes juridiques unilatéraux de droit international.
2) Classification en fonction du fondement des actes.
Certains actes sont discrétionnaires : uniquement fondés sur la volonté des Etats (reconnaissance,…).
D’autres actes trouvent leur fondement dans le DI : ils sont imposés par le DI. L’existence d’actes imposés par le DI a été reconnu par CIJ, 9/4/1949 Affaire du Détroit de Corfou.
3) Classification en fonction des effets des actes.
Les actes autonormateurs sont ceux par lesquels un Etat s’impose lui-même des obligations. Il crée ainsi des droits au profit des tiers, entendus comme les autres sujets de droit.
Les actes hétéronormateurs sont ceux par lesquels un Etat créent des obligations à la charge des tiers.
B/ Régime juridique.
1) Traits distinctifs.
Ces actes sont imputables à un seul Etat ou à un groupe d’Etats, et il faut prouver le lien d’imputabilité entre l’acte et l’Etat. Il peut donc y avoir une difficulté selon l’agent de l’Etat qui est à l’origine de l’acte.
CIJ, 12/10/1984 Délimitation des frontières maritimes dans la région du Golfe du Maine : les déclarations écrites d’un simple fonctionnaire ne constituent pas un acte juridique unilatéral imputable à un Etat.
CIJ, 20/12/1974 Affaire des essais nucléaires : une déclaration émanant du Président de la République ou du ministre de la défense constitue un acte juridique unilatéral imputable à l’Etat.
Þ Ces actes peuvent émaner de l’autorité exécutive ou d’un organe législative : il faut juste que ce soit une autorité importante au sein de l’Etat.
Ces actes sont destinés à produire des effets de droit, ce qui permet de les différencier des actes unilatéraux discrétionnaires sans effets juridiques (déclaration de courtoisie, déclaration diplomatique,…).
Ces actes doivent être publiés.
Ces actes peuvent être oraux ou écrits (CPJI 5/4/1933 Affaire des statuts juridique du Groenland Oriental : une déclaration orale est valable ; CIJ 20/12/1974 Affaire des essais nucléaires).
Ces actes peuvent être adressés à des Etats ou à l’opinion publique : leur destinataire est indifférent.
2) Validité.
Il existe très peu de règles formalisées sur cette matière.
L’invalidité peut être prononcée pour illicéité de l’objet ou du but de l’acte, ces normes ne devant violer ni les traités internationaux, ni les coutumes internationales, et ne pouvant aller à l’encontre d’une norme de jus cogens. Ces actes doivent respecter les grands principes du droit international général.
L’invalidité est sanctionnée de nullité : le CSONU a ainsi prononcé la nullité de l’annexion de Jérusalem par Israël, ainsi que celle du Koweït par l’Irak,…
La nullité est rarement prononcée par un tiers : la logique d’invalidité se transforme donc en une logique d’inopposabilité.
3) Fin des actes unilatéraux.
On doit pouvoir y mettre fin : un Etat ne peut pas être engagé de façon perpétuelle par un tel acte. Mais il faut une certaine stabilité des engagements internationaux.
En principe, on ne peut mettre fin à un acte unilatéral qu’avec l’accord des autres Etats intéressés. Cette idée a été exprimée par CIJ, 20/12/1974 Affaire des essais nucléaires : « il ne saurait exister de pouvoir arbitraire de révision des actes étatiques unilatéraux ».
C/ Effets juridiques.
Effet indirect : ces actes contribuent à la formation d’une règle conventionnelle ou coutumière.
Effet direct : certains de ces actes ont une autorité juridique immédiate. Ce sera le cas lorsque l’acte intervient dans un cadre juridique précis qui conditionne son existence et son autorité juridique. Il faut tenir compte : – du comportement des Etats tiers, en fonction duquel les effets des actes pourront varier.
– de la volonté de l’auteur de l’acte : elle confère une autorité juridique à l’acte.
1) Les actes conditionnés par les normes conventionnelles ou coutumières.
· Les actes conditionnés par les règles conventionnelles : – les actes liés aux procédures conventionnelles d’élaboration et de vie des traités (adhésion, ratification, publicité du traité, réserve, retrait,…). Ils devront être conformes aux règles générales de validité du traité, et aux règles contenues dans le traité lui-même.
– les actes liés à la mise en œuvre des règles conventionnelles : tout acte interne pris par l’Etat pour mettre en œuvre le traité, ainsi que des actes formellement internationaux.
· Les actes conditionnés par des règles coutumières : – il y a un effet indirect lorsque l’acte unilatéral est pris comme pratique constitutive d’une coutume.
– un acte pris sur le fondement d’une coutume.
2) Les actes autonomes.
Il s’agit d’une manifestation de volonté sans rapport avec un traité ou une coutume. L’Etat est libre de prendre ou non un tel acte. Cet acte opposable juridiquement à son auteur, qui est lié par le comportement qu’il a exprimé par cet acte, et ne peut pas s’en délier de façon arbitraire.
CPJI, 5/4/1933 Affaire des statuts juridique du Groenland Oriental (Danemark c/ Norvège) : la CPJI interprète l’acte unilatéral du ministre norvégien reconnaissant la légitimité des revendications danoises sur le Groenland Oriental, comme constituant un engagement ferme et liant obligatoirement la Norvège.
CIJ, 20/12/1974 Affaire des essais nucléaires : il faut interpréter l’acte pour savoir s’il constitue un engagement obligatoire.
CIJ, 22/12/1986 Affaire du différend frontalier entre le Burkina-Faso et le Mali : la CIJ considère que la déclaration unilatérale du chef d’Etat malien qui, selon le Burkina-Faso, confortait un tracé de frontière favorable au Burkina-Faso, n’a pas de force obligatoire dans la mesure où les parties auraient pu exprimer leur accord sur ce point. L’absence d’accord est un indice de l’intention du Mali.
A l’égard des tiers : – l’acte unilatéral ne pourra établir d’obligations à leur égard qu’avec leur consentement sachant que ce consentement peut être tacite, mais ne peut pas être présumé.
CIJ, 18/12/1951 Affaire des pêcheries anglo-norvégiennes : l’acte unilatéral crée une obligation à la charge de la Grande-Bretagne, et la CIJ a considéré que la Grande-Bretagne par son comportement pendant 100 ans, a tacitement acquiescé l’acte unilatéral.
– l’acte unilatéral pourra créer des droits au profit des tiers, même sans leur acquiescement, l’acte étant alors présumé être établi sur la bonne foi entre l’auteur de l’acte et les tiers. Cette solution ressort de CIJ, 20/12/1974 Affaire des essais nucléaires.